Aménagez vos espaces de travail pour encourager le collaboratif !
En réinventant vos locaux, vos postes de travail et vos espaces de réunion, vous transformez l’organisation et la gouvernance de votre entreprise. Penser usage, exploiter la mobilité et encourager le collectif : voici les trois pans d’une stratégie d’aménagement bien menée.
1. Pensez usage
40 % de vos salariés considèrent que l’entreprise n’accorde pas assez d’importance à l’aménagement de leurs espaces de travail. Et plus de 50 % regrettent le manque d’intimité, la mauvaise qualité de l’air et les nuisances sonores des Open space. S’il est souvent négligé, le cadre de travail stimule pourtant l’efficacité des collaborateurs. Ou, au contraire, l’entrave.
Pour être pertinent, un projet de réaménagement doit intégrer, en amont, les attentes et les besoins des salariés, tout en considérant la taille et l’organisation des équipes, leur mode de communication et leurs interactions. « Il faut étudier l’utilisation de l’espace, tant quantitative que qualitative, et observer comment les collaborateurs évoluent dans leur environnement », souligne Marc Veber, spécialiste de l’immobilier de bureaux d’Euklead, consultant en optimisation des coûts. Ainsi, même si l’open space est souvent privilégié par les dirigeants, trouver un compromis entre le « tout ouvert » et le « tout cloisonné » s’avère généralement plus judicieux. Bruit, intimité visuelle et confidentialité sont alors à considérer au même titre que le besoin de recevoir des visiteurs ou de téléphoner régulièrement.
La culture de l’entreprise, le profil de ses effectifs et leur tolérance aux nuisances extérieures donnent le cadre d’un puzzle dont les pièces sont multiples (plateaux de différentes tailles, bureaux individuels, cloisons d’isolation et postes de travail). Autant d’éléments qu’il convient d’assembler sans oublier la présence d’espaces, flexibles et modulables, comme les « work box », petits espaces pour une ou deux personnes et équipés d’un poste de travail, qui permettent aux salariés de s’isoler, tout en faisant office de bureaux pour les travailleurs non sédentaires, les prestataires ou partenaires présents ponctuellement sur le site. Ces postes tournants répondent aux besoins actuels des entreprises, de plus en plus confrontées à la mobilité de leurs équipes.
2. Exploitez la mobilité
Entre les entreprises clientes ou partenaires, le domicile et les tiers lieux (transports, espaces de coworking, etc.), une grande part des cadres du secteur privé exécutent leur mission depuis deux (74%), voire trois (43%) lieux différents, selon les chiffres de l’Observatoire des évolutions des modes de travail distant (Ipsos-octobre 2014). Parallèlement, le taux d’occupation des bureaux s’élève en moyenne à 89 %, d’après les Buzzy Ratios 2014 de l’Association des directeurs de l’environnement de travail (Arseg). Et le taux de postes partagés atteint, lui, 12 %. Car, l’immobilier étant le deuxième poste de dépense d’une entreprise – après sa masse salariale -, l’exploitation de ces espaces vacants constitue une source d’optimisation des coûts, et le partage de bureaux ou desk-sharing, un sacré levier d’économie.
La formule, certes alléchante, ne convient cependant pas à tous les métiers. « Pour 10 commerciaux, deux postes peuvent suffire. Neuf sont en revanche nécessaires pour 10 employés administratifs. Eu un seul ne saurait suffire à une équipe de 2 personnes », détaille Marc Veber. Pour être efficace, le desk sharing devra se doubler d’espaces « alternatifs », salles de réunion ou, au moins tables vacantes, au cas où tous les postes seraient occupés. Et pour éviter, à l’inverse, une sur-affluence, un outil partagé de réservation assurera une bonne gestion de l’occupation des postes, et permet de disposer, régulièrement, de rapports sur leur utilisation.
Chez Plantronics, spécialiste britannique de périphériques audio sans fils, près de la moitié des salariés du siège social ont fait le choix d’un bureau flexible, voire nomade, et travaillent, à leur convenance, dans les petits salons installés près de la cafétéria, dans des boxs, sur des canapés, ou sur des tables benchs – des grands plans de travail pouvant accueillir plusieurs postes. Un aménagement original qui a porté ses fruits : l’absentéisme a chuté de 9 points – passant à 3,5 % – et la productivité a grimpé de 20 %. De 65,2/100 avant les travaux de transformation, l’indice de satisfaction des salariés est passé, après, à 84. Il faut croire que ce type d’initiatives répond ainsi aux aspirations des collaborateurs. » La mobilité change la nature même de l’activité salariale. S’ils ont les moyens de travailler à distance, les employés ne viennent plus uniquement pour réaliser leur tâche à leur poste, mais également pour prendre la température et échanger « , souligne Michael Fenker, directeur du Laboratoire espaces de travail (LET) de l’école nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette. Le bureau devient ainsi, en plus d’un lieu de production, une zone d’échanges, de brainstorming, et de networking.
3. Encouragez le collectif
L’appréhension de l’aménagement des bureaux passe alors d’une logique de territoire individuel à celle de territoire collectif. Ce que confirme le développement, dans les locaux même de l’entreprise, de lieux de rencontres spontanées comme les places de village, les agoras, les cafétérias ou les jardins. En prévoyant des zones de rassemblement de l’ensemble de leurs effectifs, les dirigeants entendent bien favoriser la coopération, l’intelligence collective, ainsi que le sentiment d’intégration et d’appartenance. Des éléments déterminants pour engager leurs collaborateurs autour de projets communs.
Mais, là encore, le positionnement est à aborder à la lumière des intentions managériales : destinés à un service, plusieurs ou toute l’entreprise, ils ne seront pas situés au même endroit. « L’aménagement dépend de l’échelle de communication que l’on souhaite privilégier, appuie Michael Fenker. Selon sa situation, un même espace n’aura pas le même impact sur les individus. Situé à un étage, il encouragera, plutôt, un rapprochement entre des services amenés à travailler ensembles. Et à un autre, des interactions entre des salariés aux activités distinctes. »
Des entreprises « locavores »
Adopte un mec
Chez Adopte un mec, les fondateurs ont fait le choix du tout open space. Même eux y sont installés, avec leurs 43 collaborateurs. L’objectif : faciliter le flux d’information et, ainsi, la transparence entre les services. Les peluches et les poupées y côtoient, sur les bureaux, les dossiers, tandis que dans la cafétéria trônent flippers et baby-foot. Des locaux sont à l’image du site de rencontre : décalés. Et tout en disposant de son poste attitré, chacun peut, à sa guise, s’installer en salle de réunion ou de détente. La croissance des effectifs a poussé les équipes à s’établir sur deux étages. Une coupure géographique à laquelle les dirigeants souhaitent remédier en déménageant, début 2016, sur un plateau réunissant l’intégralité de ses effectifs.
Melty
Pelouse synthétique au sol, tables de pique-nique en bois, porte cochère de ferme blanche, arbres : les locaux de Melty, baptisés La prairie, ont un goût de campagne. Dans cette entreprise du numérique, où la majorité des employés – y compris le fondateur- appartient à la génération Y, l’accent est mis sur les espaces informels meublés de poufs et de hamacs où chacun peut partager, se détendre ou travailler. Un environnement décontracté, à l’allure d’une start-up californienne, qui compense l’atmosphère ultra-connectée de son activité. Car dans les open space, où tous les postes de travail sont réunis, des écrans diffusent en continu les statistiques des sites.
BlaBlaCar
Le témoignage de Frédéric Mazzella, fondateur de BlaBlaCar
« Créer une seule et grande équipe »
Mi-avril, BlaBlaCar a racheté son concurrent allemand Carpooling et annoncé, le 22, le lancement de son site de covoiturage au Mexique. Elle compte 290 salariés, dont 190 au siège parisien, et embauche deux à trois personnes chaque semaine. Face à ce rythme de croissance, l’unité des équipes constitue un défi constant, auquel l’entreprise répond, notamment, par l’aménagement de ses locaux. En février 2014, elle déménage ses bureaux dans le 9eme arrondissement, et y installe alors 70 des 100 collaborateurs de la société. « Nous cherchions un grand open space, sur un seul étage pour créer de la proximité, que tout le monde puisse échanger rapidement », relate Frédéric Mazzella, le co-fondateur. Installées sur deux étages depuis septembre, les équipes travaillent sur un même plateau et sont réparties en îlots. Des panneaux rappelant les valeurs de l’entreprise comme « fun and serious » ou « the member is the boss » s’affichent sur les murs et permettent aux nouveaux arrivant d’intégrer immédiatement la philosophie en interne. Une place importante est également attribuée aux espaces de détente, avec des cafeteria et une salle babyfoot. « Ce sont des vecteurs de liens sociaux, insiste Frederic Mazzella. Ils créent des connexions, des ponts, entre les départements pour créer une seule et grande équipe extrêmement motivée ».